viernes, 20 de noviembre de 2009

Imaginons que la pluie vient d’arriver














Imaginons qu’un orage vient d’éclater. Les gens courent pour se protéger de l’averse. Fuyant la pluie, deux amis se sont retrouvés sous le même porche.
Tous deux aimeraient apprendre à fabriquer de la pluie
La vie, ainsi que le besoin de trouver des réponses à leurs angoisses et passions internes, ont conduit Xabier Baztarrika à travailler les arts plastiques; et José Luis Otamendi à écrire. Bien avant de commencer à écrire ou à peindre, les études et l’amitié les avaient réunis. Ils furent compagnons d’études, premièrement au collège de La Salle de Saint Sébastien pendant le baccalauréat, et ensuite ils passèrent cinq ans ensemble à l’ EUTG, étudiant l’histoire et bien d’autres choses…
L’amitié et l’engouement qui se développa en eux attira de plus en plus l’artiste vers l’écrivain, et l’écrivain vers le peintre. Durant plus de vingt ans, ils ont collaborèrent pour créer des installations, des catalogues pour des expositions, des jaquettes de livres, de titres de tableaux, des actes de présentation d’expositions...
Dehors il continue de pleuvoir. Pendant ce temps là, les vieux amis parlent du passé, de leurs amitiés, des aspirations et projets qui les habitent aujourd’hui. Puis, ils finissent par parler des préoccupations créées par leur métier. En partant chacun d’eux de leur travail, la conversation les a conduit à aborder des sujets plus sérieux. Il pleut quelque part. Il pleut là où nous ne sommes pas…

- O.: Il me semble que nous vivons la créativité, la création, ou comme nous voudrons bien l’appeler, de façon diamétralement opposée. En plus, je dirais que c’est un paradoxe difficile à résoudre.
-X.: Mais, est-il suffisant de vivre ou de faire semblant de vivre? La façon de voir ce que tu vis, c’est ce qui donne un intérêt particulier à ce que tu fais. Chaque jour nous faisons plein de choses quasi sans nous en rendre compte… mais si tu commences à les regarder avec attention, ta façon de les voir change entièrement.
-O.: C’est vrai... mais, d’autre part, nous répondons toujours à des questions et à des stimulations; pratiquement chaque fois que nous respirons nous faisons un choix, et bien entendu, nous en écartons d’autres. Et quand tu t’en rends compte, cela génère un conflit, une sorte d’inquiétude, je ne sais...
X.: Mais la réponse que tu donnes à tes préoccupations tu dois l’exprimer quelque part, pour que cela ait de l’intérêt pour d’autres personnes. Pour que les gens puissent découvrir ou voir ta réponse. L’art a besoin d’un manche.
O.: Oui, c’est comme cela. Sans papier, sans peinture, sans support, les chemins de la créativité sont exigus, et ne perdurent pas dans le temps.
X.: Mais fais attention; le fait de relier la transcendance avec la durée me paraît un peu dépassé. Tu ne peux pas laisser de côté les performances, les installations et les représentations en direct, l’art vivant…
O.: D’accord…. Mais je veux revenir à ce dont nous parlions auparavant. Je ne sais pas si nous nous rendons compte de l’importance que revêt le fait de pouvoir choisir une option....
-X.: C’est un sujet glissant, il faut l’aborder en faisant attention. Devoir prendre chaque fois position ne doit pas nous obnubiler; cela peut devenir une obsession, et cela peut te paralyser, au lieu de t’aider à créer.
-O.: Mais si nous rejetons cette notion de choix, notre travail ne deviendra-t-il pas un simple jeu, une vétille?
-X.: Ecoute, dis ce que tu veux, mais je crois que la peinture en elle-même à une valeur. Car choisir ton style et ta technique, c’est aussi faire un choix, ou non? L’art n’est-il pas métier et liberté
-O.: D’accord. En étant un métier, il se base sur la tradition, et étant liberté, il cherche quelque chose de nouveau. Et cela aussi, d’une certaine façon, c’est un choix. Sinon, cela me paraîtrait laisser trop de chance au sort et au destin.
-X.: Le destin est une composante supplémentaire du processus de création, un autre choix en fin de compte. Et, bien souvent, pas insignifiant. N’oublie pas que la créativité est un processus dynamique, qui évolue avec toi.
-O.: Tu as raison. C’est sans doute parce que je travaille avec des mots, mais moi je préfère organiser ou mettre de l’ordre dans le chaos, chercher une sorte de syntaxe dans le monde Créer, c’est peut-être lutter contre le destin insensé.
-X.: Mais fais attention; l’obsession de créer un discours peut finir par asphyxier les facultés créatives. Je crois que les concepts de la beauté et de l’art sont trop politisés.
-O.: Oui, peut-être. Nous mettons nous-mêmes l’accent sur nos préférences. C’est à cela que nous donnons la priorité a tout moment. Parfois tu te contentes de la première chose venue, mais notre métier, presque toujours, exige un plus grand effort. Si politiser c’est cela…
-X.: Je me demande si nous ne sommes pas en train de mélanger préjugés et goûts.
-O.: Pour moi, le politique et le social contaminent tout. Qu’il y a trop d’idéologie dans notre métier?.... Eh bien oui, certainement !
-X.: Et si nous nous trompions avec cette prémisse, alors quoi?
-O.: Alors, il se peut que tout ce que nous avons fait jusqu’à présent s’appuie sur des bases erronées. Ce danger existe aussi. Et Xabi, le pire de tout: n’est-il pas déjà trop tard pour commencer maintenant à corriger ce qui a été mal fait durant tant et tant d’années?
-X.: Cela me parait un très triste aveu. J’y vois là l’ombre du conformisme ou de la résignation.
-O.: Ce n’est pas un aveu, c’est une question.
-X.: Cela m’est égal. Un des principaux rôles de l’art c’est de s’opposer au conformisme, à la passivité. Canaliser la beauté et la douleur vers la vie et le dynamisme.
-O.: Et seulement cela?
-X.: Non. Il y a aussi beaucoup d’autres choses … Par exemple, l’aspect thérapeutique de la créativité. L’art aide à surmonter les coups que nous recevons quotidiennement, c’est une sorte de remède contre l’échec et la tristesse …
-O.: De toute manière, je crois que cet aspect thérapeutique dont tu parles est le résultat de la créativité, plus qu’un objectif...
-X.: C’est possible, mais maintenant j’aimerais parler d’autre chose. Ce que tu écrivais il y a vingt ans et ce que tu écris actuellement, c’est tout à fait différent, n’est-ce pas? Même ainsi, ton travail a été un outil efficace pour exprimer ce que tu ressentais à chaque instant. Cela me préoccupe beaucoup aussi.
-O.: Cela, et que soit cohérent ce que tu fais, de créer un type de discours; c’est bien cela? Nous ne pouvons être esclaves de la mode ou des tendances du moment. Cependant, mon travail est très dépendant du jour le jour. C’est ce que je crois toutefois.
-X.: La question n’est pas là. Supposons que lorsque réalisons un tableau, un poème ou une chanson, nous sommes en train de créer une réalité qui est nouvelle, au moins pour nous. Je ne comprends pas pourquoi cette nouvelle réalité doit être liée au quotidien.
-O.: En ce qui me concerne, cela m’aide à mieux me comprendre, moi-même et mes sentiments. J’ai toujours peur qu’il y ait un décalage entre l’idée qui t’a conduit à écrire un poème et le texte même. Qu’on ne puisse identifier dans le produit final ce qui l’a inspiré!
-X.: Ecoute!; l’art en lui-même est une nouvelle réalité. Nous l’avons ressenti comme quelque chose de neuf quand nous étions en train de créer. Sinon, au lieu de tenter de créer, peut-être devrions être illustrateurs de nouvelles ou journalistes … Cette vision restreinte de la réalité ne peut pas limiter la créativité.
-O.: Tu as certainement raison, Xabi, mais, j’ai en moi une voix intérieure qui se demande continuellement si je ne suis pas trop éloigné du monde, si je ne cache pas la réalité sous quelques atours soit disant artistiques au lieu d’essayer de l’élucider.
-X.: Mais l’art possède une grande force de suggestion, et cela est bien plus que la simple imitation de la réalité.
-O.: Cela me fait entrevoir, une fois de plus, les limites de nos facultés de notre “art”. Nous voulons donner un sens à ce que nous faisons. Au moyen de peintures, de dessins, de cinéma, de musique, de mots nous tentons d’exprimer ce que signifie vivre ici et maintenant, de laisser une preuve de ce que nous sommes.
-X.: Je crois qu’en cela nous sommes condamnés à l’échec. Bien sûr, la communication n’est pas le seul objectif; la communication est aussi un moyen.
-O.: Je ne sais pas quoi dire. Se confier allège le fardeau de l’échec, même si je reconnais que cet effort a ses limites.
-X.: Je crois que rien n’est définitif, et l’art, lui aussi, doit constamment se renouveler. Il peut grandir, mais il est périssable également.
-O.: C’est un combat, mais ce combat n’est-il pas parfois quelque chose de décevant?-X.: Mais, tomber amoureux tu croyais que c’était quoi? S’asseoir sur une chaise et jouer de la guitare?



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